Psy et Téléphone
Peu après l’invention du téléphone, la première ligne d’écoute a été créée en 1905 aux États Unis. Il s’agissait d’une ligne préventive destinée aux personnes suicidaires. Peu à peu, suite à la propagation du suicide, les lignes d’écoute se sont multipliées. L’urgence était telle que les patients nécessitaient une écoute et une « disponibilité immédiate ». Cette pratique est aujourd’hui exercée dans de nombreux pays et ne cesse de se propager, même si elle reste une technique en voie de développement est peu adhérée par certains. De nombreux cas de figures ont été rencontrés en ce qui concerne les motifs d’un appel à un psychologue sur une ligne d’urgence. Un point commun à tous ces appels reste tout de même présent ; il s’agit de la souffrance psychologique endurée par les patients. Même s’il s’agit d’une ligne d’urgence, il arrive que nous recevions des appels de patients ne connaissant eux même pas la raison de leur démarche et nous exposant des petits soucis et événements non alarmants. Dans ce cas, il faut être capable pour le psychologue de comprendre l’urgence psychique de l’appelant et non l’urgence situationnelle. Il est souvent très dur pour des individus en souffrance d’affronter un psychologue en face à face et de lui exposer ses ressentis intimes, ses conflits intra psychiques et tout ce qui est enfoui au fin fond de son inconscient. Le regard de l’autre peut se révéler être un élément perturbateur pour beaucoup de gens et peut se présenter comme étant en défaveur de la liberté de parole du patient. Ce dispositif offre alors un confort sans pareil aux personnes retardant leur démarche vers le soin de peur de se confronter nez à nez avec un thérapeute. Cependant, même s’il est « confortable », le cadre téléphonique implique un travail de désillusion de la part du psychologue afin de ramener du réel au sein de l’entretien ayant lieu dans un espace imaginaire (la ligne téléphonique), pour ne pas empêcher le travail d’élaboration de se mettre correctement en place. Ce dispositif demande un certain courage pour les appelants puisqu’il s’agit là littéralement d’un « appel au secours » que nous devons comprendre comme une demande. L’objectif est alors d’encourager le patient dans sa démarche. En effet, il n’est pas rare qu’un patient se décourage instantanément, ne sachant plus la raison de son appel, se résiliant, s’excusant et souhaitant raccrocher. Même si nous ne pouvons combler l’espace de la ligne d’un regard neutre et bienveillant de clinicien, c’est avec la voix que nous allons inciter et encourager l’appelant à parler. Peu à peu, s’instaure alors un climat de confiance. Pour les patients n’ayant jamais confié leurs problèmes, cet aspect du dispositif est très important. Enfin, si l’appel a permis au patient de se déverser et d’avoir confiance en son interlocuteur et ce dispositif, des rendez-vous téléphoniques peuvent être mis en place. Au fil du temps, un transfert s’installe et une relation thérapeutique se met en place. Souvent, cela suffit pour être considéré comme un accompagnement fiable, solide et efficace. D’autres demandent une rencontre. Ici commence alors le chemin vers la guérison, puisque la relation prendra place dans un espace concret, et que nous, clinicien, disposeront de tous les outils nécessaires à son rétablissement psychique.
Hévy NADJAR